
En France, il est tout à fait possible de refuser l’héritage de ses parents, que ce soit parce qu’il y a des dettes, pour transmettre directement le patrimoine à vos propres enfants, ou encore pour des raisons qui vous sont propres. Découvrez les démarches, les conséquences et les alternatives à connaître avant de prendre votre décision.
Face à un héritage, vous disposez de trois options légales :
Vous acceptez l'intégralité de la succession : tous les biens et toutes les dettes. Vous pouvez être tenu de payer les dettes du défunt sur vos propres deniers.
Option méconnue mais souvent recommandée : vous héritez des biens mais ne payez les dettes qu'à hauteur de l'actif reçu. Votre patrimoine personnel reste protégé.
Vous refusez totalement la succession. Vous n'héritez de rien mais ne devez rien non plus (sauf exceptions détaillées ci-dessous).
Plusieurs situations peuvent vous amener à renoncer à un héritage :
Vous disposez de 10 ans maximum à compter du décès pour prendre votre décision. Passé ce délai sans réponse de votre part, vous êtes automatiquement considéré comme renonçant (article 780 du Code civil).
Pendant les 4 premiers mois suivant le décès, vous ne pouvez pas être forcé à prendre position. C'est un délai de réflexion garanti par la loi (article 771 du Code civil).
Après l'expiration du délai de 4 mois, plusieurs personnes peuvent vous forcer à choisir :
La sommation d'opter est un acte extrajudiciaire (acte d'huissier) par lequel on vous demande officiellement de prendre parti.
Selon l’article 772 du Code civil, vous avez 2 mois à compter de cette sommation d’opter pour :
Si vous ignorez une sommation d'opter, vous êtes automatiquement considéré comme ayant accepté la succession purement et simplement.
Le juge peut vous accorder un délai complémentaire si vous justifiez :
La demande de délai suspend le délai de 2 mois jusqu'à la décision du juge.
Selon l’article 804 du Code civil « La renonciation à une succession ne se présume pas. Pour être opposable aux tiers, la renonciation opérée par l'héritier universel ou à titre universel doit être adressée ou déposée au tribunal dans le ressort duquel la succession s'est ouverte ou faite devant notaire. »
La renonciation à succession doit être expresse et formelle. Elle ne se présume jamais, sauf cas exceptionnel d'absence d'option pendant 10 ans.
Pour refuser une succession, vous devez remplir le formulaire Cerfa n°15828*05. Ce document officiel peut être :
Ce dépôt est obligatoire sous peine d'inopposabilité. Sans cette formalité, votre renonciation ne sera pas reconnue et vous resterez héritier.
Peuvent exercer ce droit :
Votre renonciation n'est pas définitive (article 807 du Code civil). Tant que le délai de 10 ans n'est pas expiré, vous pouvez changer d’avis et ainsi vous rétracter afin d’accepter la succession.
Il convient néanmoins de préciser que votre rétractation n'est possible que si :
En cas de rétractation, l'acceptation se fera purement et simplement (vous hériterez de tout : actifs et dettes).
D’après l’article 805 du Code civil, l’héritier qui renonce est censé n’avoir jamais été hérité. La renonciation est un acte unilatéral par lequel l’héritier abandonne ses droits dans la succession et renonce à sa qualité d’héritier.
Cet acte a un effet rétroactif.
Concrètement :
Vous restez redevable des frais funéraires, proportionnellement à vos moyens (article 806 du Code civil). Cette obligation persiste même après la renonciation : c'est le "dernier devoir de famille".
En principe, vous pouvez conserver les donations reçues du défunt, dans la limite de la quotité disponible. Vous n’êtes donc pas tenu au rapport des libéralités.
Néanmoins, si le défunt a expressément exigé le rapport des donations en cas de renonciation, vous devrez :
L'article 845 du Code civil précise ce mécanisme : « L'héritier qui renonce à la succession peut cependant retenir le don entre vifs ou réclamer le legs à lui fait jusqu'à concurrence de la portion disponible à moins que le disposant ait expressément exigé le rapport en cas de renonciation.
Dans ce cas, le rapport se fait en valeur. Lorsque la valeur rapportée excède les droits qu'il aurait dû avoir dans le partage s'il y avait participé, l'héritier renonçant indemnise les héritiers acceptants à concurrence de cet excédent. »
Lorsque vous renoncez, vos descendants peuvent venir en représentation. C'est un mécanisme automatique dans les premier et second ordres d'héritiers.
Dans ce cas, la renonciation présente un avantage fiscal majeur : vos enfants (petits-enfants du défunt) bénéficient de l'abattement parent-enfant de 100 000 €, ce qui peut générer des économies fiscales importantes.
Si vous n'avez pas d'enfants pour vous représenter, votre part revient à vos cohéritiers du même degré.
Exemple : si vous refusez la succession de votre père avec vos deux frères, votre part sera répartie entre vos frères.
En renonçant, vous échappez totalement au paiement des dettes antérieures à la succession.
Si vos enfants viennent en représentation, ce sont eux qui hériteront… et devront payer les dettes. Ils doivent donc également renoncer s'ils veulent éviter les dettes.
À noter que pour qu'un enfant mineur renonce, il faut obligatoirement saisir le juge des tutelles.
En l’absence de descendants, ce sont les cohéritiers qui récupèrent la part du renonçant qui devront payer les dettes.
Lorsque tous les héritiers renoncent, le Domaine (service de l'État) est désigné curateur de la succession vacante. Il gère alors les biens du défunt pour désintéresser les créanciers.
Refuser une succession est une décision importante qui nécessite une analyse approfondie :
N'oubliez pas : vous disposez de 10 ans pour prendre votre décision et pouvez même revenir sur votre choix initial si les conditions le permettent.