Succession internationale : quel droit s’applique ?

Succession internationale : quel droit s’applique ?
- avocats au Barreau de Paris | Publié le

La mobilité internationale simplifiée pousse de plus en plus les personnes à voyager, travailler ou s’installer à l’étranger. Dès lors, les successions sont affectées d’un élément d’extranéité qui peut être la double nationalité du défunt, la résidence habituelle, ou des biens situés dans un autre pays que celui de sa résidence habituelle. Les successions internationales posaient, avant l’entrée en vigueur du Règlement européen sur les successions, de nombreux problèmes vis-à-vis des conflits de loi applicable aux successions. Focus sur les règles en vigueur à ce jour.

Règlement européen : l’unification du droit applicable aux successions internationales

La règle de conflit de loi française distinguait la loi applicable en fonction de la nature des biens successoraux. Les biens mobiliers étaient soumis à la loi de l’État du dernier domicile du défunt tandis que les biens immobiliers étaient régis par la loi de l’État où se situe l’immeuble. Ce système causait une fragmentation des successions internationales ce qui était difficile pour les héritiers à résoudre.

Cependant, l’entrée en vigueur du Règlement européen 650/2012 le 4 juillet 2012 est venue unifier le régime de loi applicable aux successions internationales. Le règlement s’applique à toutes les successions ouvertes à partir du 17 août 2015. Il concerne tous les États membres de l’Union européenne à l’exception du Danemark, l’Irlande et le Royaume-Uni.

Est-il possible de choisir la loi applicable à sa succession ?

Selon le Règlement, le défunt peut avoir choisi la loi applicable à sa succession avant son décès. Cependant afin d’éviter des hypothèses de fraude, le choix de la loi est limité à la loi de la nationalité du testateur au moment où il effectue son choix ou au moment de son décès.

Dans le cas où le testateur a plusieurs nationalités, il a la possibilité de choisir la loi de l’une de ses nationalités. Le testateur peut inscrire ce choix au sein de son testament ou d’un pacte successoral. La loi choisie devra respecter le formalisme inscrit dans la Convention de La Haye du 5 octobre 1961 relative à la forme des testaments.

Quelle loi s’applique à défaut de choix exprès ?

Si aucune loi n’a été choisie, le Règlement prévoit que la loi applicable sera celle de l’État où se situe la dernière résidence habituelle du défunt au moment du décès, même si cette loi n’est pas celle d’un État de l’Union européenne, elle sera appliquée à la succession.

Toutefois, il arrive parfois que le défunt présentait au moment de son décès des liens manifestement plus étroits avec un autre Etat que celui où se situait sa résidence habituelle. Par exemple, si un homme résidait au Portugal mais sa famille était située en France, et que ses biens immobiliers étaient en France, la loi française pourrait être appliquée à la succession en raison des liens plus étroits du défunt avec la France.

La création d’un certificat successoral européen

Les héritiers peuvent obtenir un certificat successoral européen lorsqu’ils veulent invoquer leur qualité d’héritiers ou exercer leurs droits en tant que tels dans tout autre État membre de l’Union européenne qui a adopté le Règlement européen.

Le certificat est délivré par un notaire et la loi applicable à la succession du défunt est mentionnée. Le certificat a une durée limitée de 6 mois.

Quelles sont les limites du Règlement ?

Le Règlement ne concerne pas les problématiques fiscales, douanières et administratives de la succession.

La théorie du renvoi a également été limitée avec l’application du Règlement, ce qui a pour conséquence de simplifier le règlement de la succession. L’article 34 du Règlement dispose que le renvoi est exclu sauf si la loi applicable est celle d’un État tiers au Règlement. Dès lors, en matière de renvoi une distinction entre les États membres et États tiers est effectuée.

Si un homme de nationalité française résidait de façon habituelle en Angleterre avant son décès, et aucun choix de loi à sa succession n’avait été effectué avant sa mort, selon les dispositions du Règlement, la loi applicable à la succession serait la loi anglaise. Dans une telle situation, les règles du droit international privé anglaises seraient appliquées à la succession qui pourrait renvoyer le règlement de la succession à la loi française.

De plus, si la loi applicable à la succession est celle présentant des liens plus étroits avec un autre État, le renvoi est également exclu quand bien même il s’agit de la loi d’un État tiers au Règlement.

La loi applicable à la succession pourra être écartée que dans le cas où son application serait contraire à l’ordre public du for.

Quid de la réserve héréditaire pour les enfants français ?

Il faut également faire attention aux problèmes de réserve héréditaire qui, avec l’application du Règlement, ne garantit plus à ce que les enfants du défunt en bénéficient d’office. Dès lors, si une personne de nationalité française résidait habituellement dans un autre pays au moment de son décès, ses enfants seraient involontairement déshérités. Il peut donc exister des cas où les enfants peuvent être déshérités. Cela peut être évité si le défunt a inscrit dans un testament la loi française comme loi applicable à sa succession.

Sources : www.notaires.fr « Le règlement UE n°650/2012 sur les successions internationales » publié le 28/06/2018.