Succession internationale : de la compétence du juge

Succession internationale : de la compétence du juge
- avocats au Barreau de Paris |
Mis à jour le 03/06/2020 Publié le

Vous êtes héritier d’une succession qui comprend des éléments d’extranéité et vous vous demandez quelles sont les conséquences sur la succession ? Quelle est loi applicable ? Quel est le juge compétent en cas de litige ? Autant de questions auxquelles vous vous retrouvez confronté. Focus sur la compétence du juge en matière de succession internationale.

La compétence du juge concernant les successions ouvertes avant le 17 août 2015

Les successions, ouvertes avant le 17 août 2015, dont les biens étaient repartis sur plusieurs États, étaient réglées par le droit international privé. Le droit international privé français disposait que la loi française pouvait s’appliquer à la succession seulement si le domicile du défunt était situé en France ou si le défunt y détenait des biens immobiliers.  Le droit international privé français opérait une distinction entre les biens meubles et les biens immeubles, ce qui pouvait conduire à un renvoi à une autre loi étrangère.

En effet, la loi qui s’appliquait aux biens meubles était la loi du dernier domicile du défunt, tandis que pour les immeubles, la loi du lieu de la situation des immeubles s’appliquait. Les juridictions françaises étaient dès lors compétentes seulement si certains immeubles du défunt étaient situés en France ou si ce dernier y résidait. Autrement, le juge français ne pouvait se déclarer compétent pour régler un litige survenu en raison de la succession.

Succession antérieure au Règlement européen : que dit le juge ?

La convention franco-belge du 8 juillet 1899 prévoyait la compétence de principe du juge du lieu d'ouverture de la succession pour la succession du Français domicilié en Belgique ou du Belge domicilié en France.

Madame Agnès G., Monsieur Eric G. et Madame Corinne G ont interjeté appel d'une ordonnance du tribunal de grande instance de Charleville-Mézières ayant autorisé Monsieur Émile G., leur frère, à exploiter dans le cadre d'une vente d'herbe moyennant le prix de 3.200 euros par an, les parcelles dépendant de l’indivision successorale.  Les consorts G ont aussi interjeté appel d'un jugement du TGI de Charleville-Mézières ayant déclaré irrecevable l'exception d'incompétence territoriale de la juridiction française. Le jugement avait donc déclaré la loi française applicable à la demande d'attribution préférentielle de Monsieur Émile G. et avait ordonné l'ouverture des opérations de compte liquidation et partage des successions ainsi que de la communauté de leurs parents, décédés en Belgique en 1995 et 2006.

Toutefois, la convention franco-belge du 8 juillet 1899 prévoyait la compétence de principe du juge du lieu d’ouverture de la succession pour la succession du Français domicilié en Belgique ou du Belge domicilié en France. Par conséquent, la convention n'est pas applicable aux consorts G. Le juge compétent est celui du lieu de la situation de l'immeuble et donc en l'espèce, le juge français.

Quelle que soit la loi applicable, les règles relatives à l'attribution préférentielle d'un immeuble situé en France ne sont pas soumises à la loi personnelle. Elles constituent des lois de police du lieu de situation et sont applicables à la succession.

La compétence du juge posée par les dispositions du Règlement européen sur les successions

Concernant les successions internationales ouvertes après le 17 août 2015, date d’entrée en vigueur du règlement européen, celles-ci sont désormais régies par la loi de la résidence habituelle du défunt au moment de son décès. Il n’existe donc plus de distinction entre la loi applicable aux meubles et immeubles du défunt.

Une autre loi peut être choisie, à savoir celle de la nationalité du défunt, s’il décide de l’inscrire dans son testament comme loi applicable. Le Règlement européen a opté pour une unicité successorale et donc en son article 4, dispose que les juridictions compétentes pour statuer sur l’intégralité des successions seraient celle du lieu de la dernière résidence habituelle du défunt au moment de son décès. Toutefois, si les héritiers souhaitent contester la compétence de ces juridictions ils doivent démontrer que le défunt présentait des liens plus étroits avec un autre État.

Prenons un exemple concret, votre père résidait en Espagne pour des raisons professionnelles avant de décéder en juillet 2016 mais avait toute sa famille située en France, ainsi que des biens meubles et immeubles. En principe, la loi applicable serait la loi espagnole. Cependant, si vous souhaitez que les juridictions françaises soient compétentes vous devrez alors démontrer que votre père avait des liens manifestement plus étroits avec la France.