La récente affaire Johnny Hallyday a mis en exergue les conflits résultant du décès de l’auteur d’une œuvre. Son épouse et ses enfants se déchirent depuis plusieurs mois au sujet de sa fortune et notamment ses royalties. De manière générale, quels conflits peuvent survenir et comment sont-ils gérés entre les héritiers ? Décryptage.
L’auteur d’une œuvre quelle qu’elle soit est protégé dès la création de celle-ci par les droits d’auteur. Ils visent à protéger d’une part le droit moral de l’auteur sur son œuvre, et plus précisément son droit de divulgation de celle-ci, et d’autre part, les droits patrimoniaux que sont les droits d’exploitation.
Ces derniers sont limités dans le temps : en effet, le créateur, en tant qu’auteur, en dispose tout au long de sa vie. À l’inverse, ses héritiers vont en disposer pendant seulement soixante-dix ans après le décès de l’auteur.
Les droits d’exploitation sont des droits économiques. Ils permettent de créer le profit financier tiré de l’exploitation de l’œuvre. Ils sont composés du droit de représentation et du droit de reproduction.
Le premier désigne la fixation matérielle de l’œuvre afin de la communiquer au public de manière indirecte. Le second est le droit de représentation qui peut être direct ou indirect.
À moins qu’un testament ait été rédigé, ces droits sont transmis aux héritiers réservataires. À défaut d’enfants, ils sont dévolus au conjoint survivant.
La transmission des droits d’auteur est source de contentieux. En témoignent l’affaire Johnny Hallyday et le conflit judiciaire très médiatique entre son épouse et ses enfants.
Les droits d’exploitation d’une œuvre sont automatiquement transmis aux héritiers réservataires au décès de l’auteur. Toutefois, l’auteur a pu rédiger un testament et désigner un légataire universel de son choix.
Il n’est pas rare que les héritiers s’opposent à l’exploitation d’une œuvre. Dans ce cas, ils peuvent opposer le droit moral de l’auteur, notamment le droit de divulgation de l’œuvre. Ce droit est transmis selon un ordre successoral spécial désignant en premier lieu l’exécuteur testamentaire. À défaut, ce droit est transmis aux descendants, puis au conjoint survivant puis aux autres héritiers.
Le fait de désigner un exécuteur testamentaire peut générer des conflits entre les héritiers qui ont la possibilité de contester ce choix.
Les conflits ne s’arrêtent hélas pas... En effet, la loi offre au conjoint survivant de l’auteur de l’œuvre un usufruit spécial sur les droits d’exploitation de cette dernière. L’existence de ce droit se justifie par le concours qu’a pu avoir le conjoint sur la création de l’œuvre aux côtés de l’auteur. Cela suppose que le conjoint puisse utiliser l’œuvre et percevoir les fruits d’exploitation.
Ce droit d’usufruit est source d’un important contentieux entre les héritiers et le conjoint survivant.
Enfin, il convient d’être prudent lorsque l’auteur de l’œuvre détenait des intérêts patrimoniaux dans plusieurs pays. Dans cette hypothèse, il faudra déterminer le droit applicable à la succession. La loi applicable est la loi de la résidence habituelle du défunt au moment de son décès. Les enjeux peuvent être considérables !
Cette question est évoquée dans l’affaire Johnny Hallyday. Les juridictions sont en effet amenées à déterminer quelle est la loi applicable entre la loi américaine et la loi française. Dans cette affaire, l’enjeu est considérable, car le droit applicable permet de savoir si le testament rédigé par la star est valable ou non. L’héritage de ses enfants en dépend puisque ledit testament prévoit de les déshériter au profit de son épouse.
Vous vous posez des questions concernant le sort des droits d’auteur dans le cadre d’une succession ? N’hésitez pas à consulter notre forum, vous y trouverez peut-être quelques réponses ...
Sources :
www.village-justice.com, « Droit des successions et droit d’auteur : l’imbroglio juridique autour de l’héritage », publié le 29 mars 2019 par Myriam Benchili : www.village-justice.com, « La réserve héréditaire à l’épreuve de l’usufruit spécial du conjoint survivant », publié le 24 août 2017 par François Buthiau