Succession d’un artiste : qui hérite de ses droits d’auteur ?

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L’un de vos proches était un artiste professionnel. À son décès, outre les biens composant son patrimoine, les héritiers doivent également se répartir la gestion de ses droits d’auteur. Que recouvre cette notion ? L’artiste peut-il déroger à la dévolution légale par testament ? Quelles sont les conditions de validité du testament ? Autant de questions auxquelles Avocats Picovschi a l’habitude d’être confronté.

Que comprennent les droits d’auteur d’un artiste ?

Le droit d’auteur est composé de deux branches :

  • D’un côté les droits patrimoniaux, c’est-à-dire les droits d’exploitation de l’œuvre ;
  • De l’autre côté le droit moral, personnel, imprescriptible et inaliénable.

Les droits patrimoniaux recouvrent principalement le droit de reproduction, le droit de représentation et le droit de suite. Ainsi, à la création de l’œuvre, seul l’auteur peut autoriser ou interdire l’utilisation de son œuvre. Il peut par la suite céder ces droits plus ou moins largement, le plus souvent en l’échange d’une contrepartie financière.

Les contrats de cession de droits doivent toujours comprendre plusieurs mentions visant à préciser les utilisations autorisées : la durée de la cession, l’étendue géographique, le type de diffusion ou de représentation, etc. Ce qui n’est pas explicitement autorisé par la cession sera en principe interdit. La rémunération est en principe une participation proportionnelle aux recettes engendrées par l’exploitation de l’œuvre, mais peut être par exception forfaitaire. Au moment de la succession, le contenu des contrats devra impérativement être examiné avec attention pour connaître l’étendue des droits transmis.

Parallèlement, le droit de suite est un droit spécifique aux artistes plasticiens. Il s’agit du droit pour l’auteur d’une œuvre d’art graphique ou plastique originale, et pour ses ayants droit pendant 70 ans après le décès de l’auteur, de percevoir un pourcentage du prix lors des reventes successives de l’œuvre, par un professionnel du marché de l’art. Il s’agit d’un droit immatériel inaliénable attaché aux ventes du support matériel de l’œuvre originale, auxquelles l’artiste n’est plus partie. Cette mesure vise à associer l’auteur au succès de son œuvre sur le marché de l’art.

Les droits patrimoniaux s’éteignent 70 ans après le décès de l’auteur et sont donc transmissibles aux héritiers. Passé ce délai, les œuvres tombent dans le domaine public et peuvent être librement utilisées, lorsque cette utilisation ne contrevient pas au droit moral de l’auteur.

En effet, le droit moral de l’artiste est perpétuel et imprescriptible, il doit toujours être respecté. Le droit moral comprend le droit de paternité (respect du nom de l’auteur), le respect de l’intégrité de l’œuvre (ne pas la dénaturer ou lui porter atteinte), le droit de retrait ou de repentir, et le droit de divulgation (le fait d’autoriser la première divulgation d’une œuvre).

Si l’ensemble de ces droits appartenait à une seule personne - l’artiste - de son vivant, il n’en est pas de même à son décès, ce qui peut être source de conflits.

Or, il est indispensable de régler la question de la répartition des droits d’auteur lors du règlement de la succession, car ce sont les héritiers qui pourront signer de nouveaux contrats de cession ou, dans certains cas, agir en contrefaçon, dès lors qu’un tiers porterait atteinte à l’un des droits portant sur une œuvre du défunt artiste.

Répartition des droits au décès de l’artiste, avec ou sans testament

Le Code de la propriété intellectuelle prévoit que les droits de reproduction et de représentation et le droit de suite sont transmis automatiquement aux héritiers réservataires, soit les enfants.

Cependant, en présence d’un testament, le défunt artiste a pu prévoir une gestion en indivision de ces droits avec un légataire universel. Ce légataire peut être la dernière compagne de l’artiste, un ami, un autre artiste… avec lequel les héritiers réservataires vont devoir s’entendre.

Parallèlement, le droit moral est transmissible aux héritiers et ne s’éteint jamais. Concernant le droit de paternité et le respect de l’intégrité de l’œuvre, composantes du droit moral de l’artiste, là encore, ce sont les héritiers réservataires qui en héritent en l’absence de disposition. La Cour de cassation a ainsi jugé que « le droit au respect de son nom, de sa qualité et de son œuvre est transmissible à cause de mort à ses héritiers selon les règles ordinaires de la dévolution successorale » (Cour de cassation, 1re chambre civile., 11 janvier, 87-11.978).

Le droit de divulgation quant à lui, se transmet selon un ordre successoral spécial distinct des autres prérogatives du droit moral (L. 121-2 du Code de la propriété intellectuelle). En effet, eu égard aux enjeux importants du droit de divulgation (la personne qui en aura hérité sera la seule à pouvoir décider de l’exposition, la publication, la vente… ou non d’œuvres non connues), le Code de la propriété intellectuelle prévoit qu’il est transmis en priorité, en l’absence de testament, à l’exécuteur testamentaire. Si une telle personne n’a pas été désignée, ou au décès de celle-ci, ce droit sera transmis dans l’ordre suivant : aux descendants, au conjoint survivant, aux autres héritiers que les descendants qui recueillent tout ou partie de la succession et par les légataires universels ou donataires de l'universalité des biens à venir, etc.

Par ailleurs, l’auteur peut choisir un légataire universel désigné par testament qui héritera du droit moral. L’auteur a pu prévoir qu’une seule personne serait responsable du droit moral, en excluant, par exemple, l’un des enfants au profit de l’autre (Cour de cassation, 1re chambre civile, 25 mars 2010, n°09-67.515).

En l’absence de testament dans le cadre de la succession d’un artiste, le risque de conflits entre héritiers est grand. Il est indispensable de se rapprocher d’un avocat expert dans les successions d’artistes afin de bien connaître l’étendue de ses prérogatives, le contenu de chaque composant des droits d’auteur et défendre ses intérêts et ceux du défunt artiste.

La transmission du droit moral à un seul héritier par testament : attention à sa validité !

La Cour de cassation, par un arrêt du 13 janvier 2016, a eu à connaître d’une affaire où un héritier revendiquait la titularité du droit moral du défunt artiste, en vertu d’un testament olographe. La question de la titularité de ce droit était d’une grande importance, car cette personne souhaitait agir en réparation du préjudice subi par l’édition d’un ouvrage illustré du défunt artiste.

La Cour de cassation a réaffirmé que « la volonté de l’auteur de transmettre le droit moral sur son œuvre doit être exprimée selon les formes requises pour l’établissement des testaments ».

L’article 970 du Code civil, tel qu’édicté avant la réforme de 2006, conditionnait la validité du testament olographe au fait qu’il soit écrit « en entier, daté et signé de la main du testateur ». 

Or, dans cette affaire, la Cour de cassation a validé le raisonnement tenu par la Cour d’appel qui en avait « déduit que ce testament était nul et qu’il ne pouvait avoir pour effet de transmettre le droit moral [de l’artiste] sur son œuvre », dès lors qu’il avait été « constaté que le testament n’avait pas été écrit de la main du testateur ».

Ainsi, même en présence d’un testament, des conflits quant à la titularité des droits peuvent survenir. C’est pourquoi il est fortement recommandé de faire appel à un avocat compétent en matière de propriété intellectuelle lors de l’ouverture de la succession, voire en amont, afin de régler ces questions. Pour faire respecter les volontés de l’artiste après sa mort, organiser sa succession avec un expert en droit des successions et en droit d’auteur sera un atout essentiel.

Avocats Picovschi, passionné par le marché de l’art et toutes les problématiques qu’il peut entrainer, saura vous apporter ses précieux conseils en pareille situation.

Sources : www.legifrance.gouv.fr ; article L. 121-2 du code de la propriété intellectuelle ; Cour de cassation, 1re chambre civile., 11 janvier, 87-11.978 ; Cour de cassation, 1re chambre civile, 25 mars 2010, n°09-67.515 ; Cour de cassation, 1ere chambre civile, 13 janvier 2016, n° 14-29.833.

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