Don manuel : définition, montant, déclaration

Don manuel : définition, montant, déclaration

SOMMAIRE

Dans le cadre familial, les cadeaux sous forme de sommes d’argent sont courants, notamment à l’occasion d’un anniversaire, d’un mariage ou d’une naissance ! Dès lors que le don dépasse un certain montant ou qu’il n’est pas fait à l’occasion d’un évènement particulier, le cadeau peut perdre sa qualification de présent d’usage pour devenir un don manuel. Avocats Picovschi revient avec vous sur les conséquences de cette requalification qui ne sont pas anodines….

Définition du don manuel

Le don manuel correspond à une donation entre vifs qui se réalise par la remise de la chose du donateur au donataire. Il s’agit de donner des biens ou des sommes d’argent à une personne sans qu’il soit besoin de passer par la forme écrite donc sans établir d’acte de donation. Il ne peut en revanche s’agir de biens immobiliers, qui, eux, doivent faire l’objet d’un acte notarié.

Le don manuel est une technique de transmission courante qui se fait de la main à la main. Il n’exige aucune formalité particulière. La jurisprudence admet toutefois que le don puisse se matérialiser par un chèque ou un virement bancaire (Cass., 1re Civ., 5 février 2002, n° 99-18578 ou Cass. ,1re Civ., 4 juillet 2018, n° 16-24.498, inédit).

L’absence de formalité n’enlève pas au don manuel la qualification de donation. Il est donc soumis aux droits de mutation, plus communément appelés droits de donation, et aux règles civiles des donations. L’article 757 du Code général des impôts explicite la nuance entre la donation telle que définie par le Code civil et le don manuel à proprement parler pour taxer ce dernier.

À noter qu’un parent a la possibilité de donner jusqu'à 100 000 euros à chacun de ses enfants sans payer de droits, tous les 15 ans. Cet abattement se cumule avec un autre de 31 865 euros accordé tous les 15 ans pour les dons d’argent. Au-delà, des droits sont à régler.

Faut-il déclarer les dons manuels ?

Il faut, parmi les dons de la main à la main, distinguer le présent d’usage car si vous avez en principe l’obligation de déclarer un don manuel, vous n’êtes pas tenu d’informer l’administration d’un présent d’usage.

Le présent d’usage n’est pas soumis aux droits de mutation à titre gratuit (impôts applicables à une donation ou à une succession) contrairement aux dons manuels qui seront taxables si l’Administration découvre leur existence. La nuance entre ces deux notions est donc de taille puisque toutes les fois que vous gratifiez au-delà d’une certaine somme et qu’il ne s’agit pas d’un présent d’usage au sens juridique, vous êtes susceptible d’être redevable de droits de mutation.

La jurisprudence définit largement les présents d’usage comme « les cadeaux faits à l’occasion de certains évènements, conformément à un usage, et n’excédant pas une certaine valeur » (Cass., Civ., 6 décembre 1988, n° 87-15083). En l’absence de définition précise, les juges statuent au cas par cas. Il n’en demeure pas moins que le présent peut être fait à l’occasion d’évènements aussi variés qu’un anniversaire, Noël, un mariage, le succès à un examen ou encore un déménagement (Cass., Com., 29 janvier 2002, n° 98-14.252). La valeur doit quant à elle être appréciée en fonction des revenus, du niveau de vie et du patrimoine du disposant au moment où le présent est consenti (article 852 du Code civil). Elle doit en effet avoir un caractère raisonnable et ne pas être disproportionnée par rapport aux ressources du donateur.

Attention donc, si le présent ne respecte pas ces règles, l’administration pourra le requalifier en donation et le cas échéant réclamer des droits de mutation à titre gratuit s’il dépasse une certaine somme. Dans ce cas, l’assistance d’un avocat compétent en matière de fiscalité successorale vous sera bénéfique pour démontrer votre bonne foi et négocier avec l’administration fiscale.

Déclaration de don manuel

Vous avez reçu ou effectué un don manuel et vous vous demandez quel est le délai de déclaration d’un don manuel ?

Le don manuel doit faire l’objet d’une déclaration à l’Administration fiscale dans le délai d’un mois suivant la remise effective du don. Cette déclaration est en principe le fait du donataire mais le donateur peut aussi décider de s’en charger. Attention : tous les dons manuels (hormis les présents d’usage) doivent obligatoirement être portés à l’attention du fisc, quand bien même leur montant serait exonéré de droits.

Cette déclaration est effectuée via le formulaire CERFA n°2735 à déposer en deux exemplaires. Notez que vous avez la possibilité d’opter pour le paiement différé des droits dus au titre du don effectué, paiement qui ne sera alors exigible que dans le mois suivant le décès du donateur. Il vous faudra dans ce cas remplir le formulaire CERFA n°2734.

Dans certains cas, vous pouvez aussi procéder à votre déclaration en ligne. Le mode de déclaration varie en effet en fonction :

  • De la valeur du don (selon qu’il excède ou non la somme de 15 000 euros)
  • De la révélation du don (selon qu’elle est spontanée c’est-à-dire à votre propre initiative ou qu’elle fait suite à un contrôle)

Du moment de la déclaration (immédiate ou différée).

Conséquences civiles du don manuel

Le don manuel est parfaitement licite et constitue une donation au même titre que la donation notariée. S’il est révélé, le don manuel viendra s’ajouter à la masse successorale lors du règlement de la succession. Il s’imputera en principe sur la quotité disponible ou sur la réserve héréditaire selon la qualité de son bénéficiaire. Ce rapport vise à rétablir l’égalité entre les héritiers en l’absence de dispositions testamentaires.

Lorsqu’il s’agit de la donation d’une somme d’argent, le nominalisme monétaire s’applique : le rapport est effectué pour le montant au moment de la donation. Si la somme a servi à l’acquisition d’un bien, il faudra prendre en compte sa valeur au moment de la succession. Par ailleurs, en cas de donation portant sur un bien, la donation est rapportée selon la valeur du bien donné à l’époque de la succession, d’après son état à l’époque de la donation.

Le don pourra être réductible s’il excède la quotité disponible et porte atteinte à la réserve des autres héritiers qui peuvent recourir à l’action en réduction.

Par ailleurs, si le donataire a également la qualité d’héritier, le don manuel pourra être rapportable. Il sera présumé avoir été réalisé en avancement de la part successorale et devra donc être intégré à la masse à partager (masse de tous les biens existants au moment du partage). En revanche, si le donataire est un tiers non appelé à la succession, ce dernier n’aura pas à rapporter le bien à la masse partageable.

La dissimulation d’un don manuel est déconseillée, car les héritiers peuvent consécutivement invoquer un recel successoral. L’héritier coupable de recel pourra alors être privé de sa part sur la succession. Que vous soyez accusé de recel successoral ou que vous souhaitiez intenter une action contre un autre héritier, l’assistance d’un avocat en droit des successions est vivement recommandée.

Conséquences fiscales du don manuel non déclaré

La taxation des dons manuels obéit au barème des droits de donation après les mêmes abattements. Le paiement de droits de mutation se fait concomitamment à la déclaration du don.

Attention ! Les soupçons de l’Administration fiscale sur l’existence d’un don manuel non déclaré résident souvent dans la différence importante constatée entre les revenus déclarés et les ressources investies ou dépensées. Sachez que vous pouvez faire l’objet d’un redressement fiscal. Ce dernier aura pour but de régulariser votre situation vis-à-vis du fisc. Pour cette raison, il faut toujours être en mesure de justifier de la provenance et de l’origine de ses fonds.

La révélation d’un don manuel, si elle n’est pas provoquée par le donataire lui-même, a donc de grandes chances d’intervenir à l’occasion d’une procédure de contrôle ou au cours du règlement d’une succession ; en effet personne n’est à l’abri d’un contrôle fiscal successoral. Or sachez que dans ce cadre le don manuel a vocation à être réévalué au jour du décès du donateur, ce qui risque de faire augmenter les droits de succession dus. Déclarer le don et donc s’acquitter des droits correspondants immédiatement peut donc se révéler être un avantage non négligeable.

Le donataire non-héritier sera en principe débiteur des droits de donation sans autre pénalité particulière. Les conséquences financières risquent en revanche d’être plus graves pour le donataire qui est en même temps héritier du donateur. En application de la règle du rappel fiscal, toute donation portée à la connaissance du fisc doit mentionner les donations antérieurement consenties dans les 15 années qui précèdent par le donateur au même bénéficiaire. Si, par exemple, à la suite de la déclaration de succession, le fisc parvient à prouver que le donataire a volontairement omis de déclarer un don manuel, il exigera les droits normalement dus, assortis des intérêts de retard (0,40 % par mois) et des pénalités pouvant atteindre 80 %.

Il peut donc être utile de formaliser le don manuel, afin de préconstituer la preuve de l’origine des fonds et évacuer le spectre de la dissimulation de fonds. L’enregistrement du don auprès de l’Administration fiscale est par ailleurs une formalité intéressante puisqu’il lui confère une date certaine et permet de figer sa valeur à la date de déclaration. Le fait de déclarer le don manuel permet par ailleurs de faire courir le délai de 15 ans pour les abattements. Il est donc dans votre intérêt de déclarer le don manuel, car à défaut le montant du don pourra s’imputer sur l’abattement de 100 000 euros au moment du décès.

Vous avec un doute sur vos droits et obligations en matière de don et souhaitez optimiser la manière dont vous consentez cette libéralité ? Vous voulez donner un coup de pouce à vos enfants, mais attention dans certains cas le don manuel peut devenir un cadeau empoisonné au moment du règlement de la succession. Avocats Picovschi, compétent en droit des successions et en droit fiscal depuis plus de 30 ans, vous assiste dans toutes vos problématiques liées aux dons manuels.

Sources : article 852 du Code civil ; article 757 du Code général des impôts ; Cass., Civ., 6 décembre 1988, n° 87-15.083 ; Cass., Com., 29 janvier 2002, n° 98-14.252 ; Cass., 1ère Civ., 5 février 2002, n° 99-18.578 ; 1re Civ., 4 juillet 2018, n° 16-24.498

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