Le caractère insaisissable de l'assurance-vie soulevé dans l'affaire Tapie

Le caractère insaisissable de l'assurance-vie soulevé dans l'affaire Tapie
- avocats au Barreau de Paris |
Mis à jour le 06/05/2015 Publié le

Fin 2013, une part du patrimoine du businessman ayant obtenu 400 millions d’euros dans le cadre du litige relatif à la vente d’Adidas par le Crédit Lyonnais, a fait l’objet d’une saisie conservatoire.

Remise en cause de la procédure d’arbitrage

La procédure d’arbitrage qui avait pourtant été acceptée par l’État à l’époque a été remise en cause. Les conséquences judiciaires de cette histoire font apparaître une modification relative au droit du plus haut intérêt pour les épargnants. Les juges ont préféré procéder à la saisie conservatoire notamment des assurances vie (article 706-155 nouveau du Code de Procédure Pénale) via la mise en examen de Bernard TAPIE pour « escroquerie en bande organisée ». Selon le Ministère Public, la saisie d’une part du patrimoine du principal intéressé permet d’éviter tout risque de rendre ses biens insaisissables (notamment les assurances vie) en évitant la fuite de ses capitaux. Bernard TAPIE et son épouse sont titulaires de deux contrats d’assurances vie depuis fin 2008, souscrits après avoir obtenu 278 millions d’euros environ, pour un montant de rachat estimé par les enquêteurs à plus de 20 millions d’euros. 
En outre, le holding Groupe Bernard TAPIE détient pour une valeur de 180 millions d’euros une assurance vie.

La saisissabilité des assurances vie

La question du caractère insaisissable de l’assurance-vie est soulevée par cette décision de justice. « Ce placement est, rappelons-le, une convention aux termes de laquelle une personne morale (assureur) s'oblige envers une autre personne physique ou morale (souscripteur ou stipulant), moyennant une prestation (prime), à verser au souscripteur, ou à un tiers désigné ou encore incertain et identifiable (tiers bénéficiaire), une somme d'argent qui peut être une rente ou un capital au décès de la personne désignée (assuré). »

Cet outil de prédilection des français permettant la gestion du patrimoine a de nombreux avantages. Il permet notamment une épargne réfléchie en fonction du but rechercher, de se procurer des émoluments complémentaires lorsque le souscripteur est encore en activité ou bien le cas échéant de se garantir une retraite. L’assurance vie est également un outil de transmission de patrimoine tant pour ses héritiers que pour un tiers. Il est nécessaire de souligner que ce tiers peut être externe au cercle familial. En outre, le capital ainsi épargné est considéré comme hors actif successoral.

. En effet, l’assurance vie peut donner lieu à des contentieux liés à un détournement ou à une captation d’héritage. Seul un professionnel de ce domaine est à même de connaître les subtilités découlant de ce contrat et de ses conséquences sur l’héritage.

Les sommes investies bénéficient d’une excellente protection en ce qu’elles ne peuvent faire l’objet d’une saisie (avant l’échéance du contrat), sauf exception. En effet, une analyse purement juridique permet d’observer que les sommes versées appartiennent à la compagnie d’assurance et non au souscripteur. L’assurance vie est donc, par nature, « civilement insaisissable »

Le spécial prime sur le général : la possibilité de saisir un contrat d’assurance vie

Néanmoins, en France, est appliqué l’adage " specialibus generalibus derogas " qui signifie que le spécial prime le général. En vertu de ce principe, si une règle spécifique existe, il est dérogé au droit commun (droit civil). Ainsi, il est possible dans le cadre d’une enquête pénale de saisir un contrat d’assurance vie. Cette dérogation est prévue par la loi du 9 juillet 2010 « visant à faciliter la saisie et la confiscation en matière pénale». Selon le Code civil, « le contrat d’assurance vie est, par principe, insaisissable sans l’acceptation du stipulant ». Or le Code des Assurances dispose que « le contrat d’assurance vie constitue une exception au droit de gage général du créancier et est de ce fait insaisissable. »

Il faut noter que l’article 132-14 du Code des Assurances prévient que « le capital ou la rente garantis au profit d'un bénéficiaire déterminé ne peuvent être réclamés par les créanciers du contractant ». Cependant, lorsque les créanciers prouvent que le contrat souscrit n’avait d’autres finalités que de diminuer la valeur du patrimoine saisissable du souscripteur ou bien que les primes sont manifestement exagérées au vu de ses facultés financières, il est autorisé, à titre exceptionnel de procéder à la saisie de l’assurance vie par les créanciers. Cette nouvelle législation met un terme au caractère insaisissable de l’assurance vie. C’est ainsi que Bernard TAPIE voit ses assurances vie « gelées » jusqu’au jugement sur le fond.

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